07 Septembre 2014 à Mulhouse (Alsace, France) :
Je brade lors d’un vide-grenier tous mes meubles, sur le trottoir, au pied de l’immeuble dans lequel j’occupe un spacieux appartement de 100m2.
Etrange d’observer ses biens mobiliers proposés au public et les voir partir au compte gouttes dans les quatre directions de la ville. En fin de matinée, je n’ai presque plus rien, je me sens presque à nu…je vais pouvoir partir léger…
Je suis alors encore architecte en exercice et ce depuis 1999 : l’architecture est une réelle passion pour moi, mais je ne partage plus l’évolution donnée à la profession.
Je dois partir, laissant derrière moi une carrière dont je suis fier, avec quelques belles victoires et de fantastiques aventures humaines…pour rejoindre la mer !
Mon frère, qui est établi et travaille sur la Presqu’île de Giens peut m’y accueillir un temps. Je n’ai devant moi qu’un seul travail qui m’attend…en Thaïlande : une courte mission de quelques semaines chez Starboard, premier fabricant mondial de planches de Windsurf et Stand Up Paddle. J’ai obtenu ce travail en réussissant à soumettre, lors du dealer meeting annuel de la firme en Espagne, mes idées de graphic design de planches…en candidature totalement spontanée.
S’en suivront avec Starboard deux belles années de collaboration…mais c’est une autre histoire.
J’arrive donc sur la Presqu’île de Giens en fin d’année 2014 pour y débuter une nouvelle vie, livré à moi-même dans un environnement que j’ai eu la chance de choisir…où la mer est omniprésente. Je me sens très vite ragaillardi physiquement et mentalement par des sessions quotidiennes de Windsurf, Stand Up Paddle, plongées en apnée ou encore quelques convoyages de voiliers en tant que matelot.
Je retrouve la ferme intention de donner une voix à ce qu’il y a au fond de moi et de poursuivre, coûte que coûte, un développement personnel en adéquation avec mes convictions profondes.
C’est un retour aux sources, à la nature, au soleil et sa lumière : au quotidien, je songe à « l’Homo delphinus », homme dauphin si cher à Jaques Mayol et me laisse guider par l’appel de la mer.
J’entretiens une complicité très importante avec mon lieu de vie, ce mince territoire, cet entre-deux : la Presqu’île de Giens. Tous les bois que je travaille se sont échoués sur ses côtes ou voguaient à leur proximité. L’art, comme le langage, nous a permis de distinguer, dans des temps reculés, des groupes humains, à l’établissement géographique spécifique. Avec les personnes qui partagent ma vie ici, mon travail se veut l’expression et la défense d’un art de vivre : celui de vivre en harmonie et à l’écoute de la nature, de soi _ celui aussi d’évoluer en mer.
La mer reste un espace d’exception, où l’aventure n’est pas morte, qui nous invite, dans une longue et intime relation, à savourer pleinement ces trop courts instants de vie.
Comme le souligne Jack London dans « La croisière du Snark », naviguer en mer permet de « passer par toute la gamme des émotions humaines ». « C’est une occasion de jeter un regard sur soi-même, de converser familièrement avec son âme » et puis « il y a l’entrainement et la discipline, apprendre à discerner ses imperfections et ensuite, forcément, à les maîtriser ». Autant de valeurs qui sont partagées par la petite« communauté de la plage » à laquelle j’appartiens désormais. Attachement fort donc à un lieu, à ses gens, à son climat aussi…
Je m’organise avec les saisons, les périodes hivernales et de printemps étant plus propices à la trouvaille de belles pièces de bois : les grosses tempêtes sont en effet plus fréquentes et c’est après un bon coup de vent d’Est que la mer ramène sur les côtes tous ses trésors. A contrario, un peu avant le début de l’été et ce, jusqu’à l’automne, les plages sont quotidiennement nettoyées par les services d’entretien municipaux pour accueillir les touristes qui affluent alors en masse pendant cette période.
Restent alors les petites criques, toujours, accessibles par la mer, où, quelque soit le moment de l’année, je reçois, comme le plus beau des présents, chaque pièce de bois que la mer consent à me donner.